Traduit de l'américain par E. Michel Tyl
Traduction révisée par Emmanuelle de Lesseps
Editions Gallimard, folio policier, 1984 pour la traduction française, 268 pages
L'été dernier j'ai lu Fenêtre sur cour et autres nouvelles et je m'étais promis de revenir vers cet auteur, auquel on doit notamment La sirène du Mississippi et J'ai épousé une ombre.
Je voulais le lire dans des histoires un peu plus étoffées que des nouvelles.
J'ai vu l'adaptation de François Truffaut, avec Jeanne Moreau, il y a longtemps, à la télé. Je ne me souvenais pas de la fin, juste du mobile et d'avoir passé un bon moment.
Je ne voudrais pas trop en dire, je trouve que c'est beaucoup plus agréable de se laisser porter par le suspense (même si ici on connaît le meurtrier dès le départ et si probablement beaucoup d'entre vous ont déjà soit lu le livre, soit vu le film).
Le suspense ne réside pas non plus vraiment dans le mobile, on l'entrevoit assez facilement... La tension vient dans le fait de voir approcher la mort, de se demander si la personne qui frappe se fera démasquer et sur les circonstances de l’événement initial, celui qui a conduit à la machination que le lecteur voit se dérouler sous ses yeux.
La chute est plutôt inattendue, et différente de celle du film (ainsi que je l'ai dit, je ne m'en rappelais pas mais j'ai effectué quelques recherches sur internet)
J'ai trouvé l'écriture assez distanciée des personnages, je ne me suis attachée ni aux victimes ni au bourreau, que je n'ai cependant trouvé ni sympathique ni antipathique.
Mais j'ai pris beaucoup de plaisir à lire cette intrigue, construite selon un schéma qui se répète mais sans que je trouve cela gênant. Je trouve même que la construction participe à la tension.
Voici le début de l'histoire :
- JULIE ! Ma Julie !
La voix suivit la femme dans l'escalier jusqu'au bas des quatre étages. C'était le murmure le plus doux, l'appel le plus fort de des lèvres puissent lancer. Cela ne la fit pas hésiter, ni rater une marche. Son visage était très pâle lorsqu'elle sortit dans la lumière du jour et rien de plus.
La fillette qui attendait près de la valise, à la porte d'entrée, se retourna et la regarda, presque incrédule tandis que Julie la rejoignait, l'air de se demander comment elle avait trouvé la force d'en finir. La femme parut lire dans ses pensées ; elle répondit à la question silencieuse.
- C'est aussi dur pour moi que pour eux, de dire adieu, mais moi je m'étais faite à cette idée, pas eux. J'ai eu tant de longues nuits pour m'endurcir. Eux, c'est la première fois que ça leur arrive. Moi, c'est la millième fois que je vis ces instants.
Et, sans changer de ton, elle poursuivit :
- Je vais prendre un taxi ; il y en a un là-bas.
Comme la voiture approchait, la fillette la regarda d'un air interrogateur.
-Oui, tu peux m'accompagner si tu veux. A la gare de Grand Central, chauffeur.
Elle ne se retourna pas pour regarder la maison, ni la rue qu'elle quittait. Elle n'eut pas un regard pour les autres rues qu'elle connaissait si bien, pour ce coin de ville où elle avait toujours vécu.
Elles durent attendre un peu devant le guichet où quelqu'un s'attardait. La petite fille, à côté d'elle, s'accrochait désespérément à son bras.
- Où vas-tu ?
- Je ne sais pas. Je n'y ai même pas encore pensé.
Elle ouvrit son sac à main, partagea en deux paquets inégaux la mince liasse de billets qu'il contenait et garda la plus petite partie dans sa main. Elle se pencha vers l'ouverture du guichet et posa l'argent sur la tablette.
- Jusqu'où je peux aller avec ça ?
- Chicago, et je vous rends quatre-vingt-dix-cents.
-Alors un aller.
Elle se tourna vers la fillette.
- Tu peux retourner à la maison. Tu pourras au moins leur raconter ça.
- Je ne dirai rien, si tu ne veux pas, Julie.
- ça n'a pas d'importance. Qu'est-ce que ça change, le nom d'un lieu, quand on part sans retour ?
Elles s'assirent un moment dans la salle d'attente. Puis elles descendirent l'escalier qui menait au quai, demeurèrent un instant côte à côte devant la portière du wagon.
- Embrassons-nous, comme de vraies petites amies d'enfance.
Leurs lèvres s'effleurèrent, vite. "Voilà."
- Julie, je ne sais quoi te dire.
- Dis-moi adieu. Que dit-on jamais d'autre, dans cette vie ?
- Julie, j'espère que je te reverrai un jour prochain.
- Tu ne me reverras plus jamais.
Le quai s'éloigna. Le train s'engouffra dans le long tunnel. Puis il émergea de nouveau à la lumière, s'élevant au sommet d'une rampe d'où l'on pouvait voir les étages supérieurs des maisons, tandis que les rues transversales défilaient comme les jours d'une palissade.
Le train ralentit brusquement ; il avait à peine atteint sa vitesse maximale.
- Vingt-cinquième rue, chantonna distraitement le contrôleur.
La femme qui s'en allait pour toujours se leva, prit sa valise et parcouru le couloir, comme si elle terminait son voyage au lieu de le commencer.
Elle était debout tout contre la porte de sortie, lorsque le convoi s'arrêta. Elle descendit, suivit le quai et prit l'escalier qui menait à la rue. Elle acheta un journal au kiosque de la salle d'attente, s'assit sur un banc et consulta la page des petites annonces.
Voici le début de l'histoire :
- JULIE ! Ma Julie !
La voix suivit la femme dans l'escalier jusqu'au bas des quatre étages. C'était le murmure le plus doux, l'appel le plus fort de des lèvres puissent lancer. Cela ne la fit pas hésiter, ni rater une marche. Son visage était très pâle lorsqu'elle sortit dans la lumière du jour et rien de plus.
La fillette qui attendait près de la valise, à la porte d'entrée, se retourna et la regarda, presque incrédule tandis que Julie la rejoignait, l'air de se demander comment elle avait trouvé la force d'en finir. La femme parut lire dans ses pensées ; elle répondit à la question silencieuse.
- C'est aussi dur pour moi que pour eux, de dire adieu, mais moi je m'étais faite à cette idée, pas eux. J'ai eu tant de longues nuits pour m'endurcir. Eux, c'est la première fois que ça leur arrive. Moi, c'est la millième fois que je vis ces instants.
Et, sans changer de ton, elle poursuivit :
- Je vais prendre un taxi ; il y en a un là-bas.
Comme la voiture approchait, la fillette la regarda d'un air interrogateur.
-Oui, tu peux m'accompagner si tu veux. A la gare de Grand Central, chauffeur.
Elle ne se retourna pas pour regarder la maison, ni la rue qu'elle quittait. Elle n'eut pas un regard pour les autres rues qu'elle connaissait si bien, pour ce coin de ville où elle avait toujours vécu.
Elles durent attendre un peu devant le guichet où quelqu'un s'attardait. La petite fille, à côté d'elle, s'accrochait désespérément à son bras.
- Où vas-tu ?
- Je ne sais pas. Je n'y ai même pas encore pensé.
Elle ouvrit son sac à main, partagea en deux paquets inégaux la mince liasse de billets qu'il contenait et garda la plus petite partie dans sa main. Elle se pencha vers l'ouverture du guichet et posa l'argent sur la tablette.
- Jusqu'où je peux aller avec ça ?
- Chicago, et je vous rends quatre-vingt-dix-cents.
-Alors un aller.
Elle se tourna vers la fillette.
- Tu peux retourner à la maison. Tu pourras au moins leur raconter ça.
- Je ne dirai rien, si tu ne veux pas, Julie.
- ça n'a pas d'importance. Qu'est-ce que ça change, le nom d'un lieu, quand on part sans retour ?
Elles s'assirent un moment dans la salle d'attente. Puis elles descendirent l'escalier qui menait au quai, demeurèrent un instant côte à côte devant la portière du wagon.
- Embrassons-nous, comme de vraies petites amies d'enfance.
Leurs lèvres s'effleurèrent, vite. "Voilà."
- Julie, je ne sais quoi te dire.
- Dis-moi adieu. Que dit-on jamais d'autre, dans cette vie ?
- Julie, j'espère que je te reverrai un jour prochain.
- Tu ne me reverras plus jamais.
Le quai s'éloigna. Le train s'engouffra dans le long tunnel. Puis il émergea de nouveau à la lumière, s'élevant au sommet d'une rampe d'où l'on pouvait voir les étages supérieurs des maisons, tandis que les rues transversales défilaient comme les jours d'une palissade.
Le train ralentit brusquement ; il avait à peine atteint sa vitesse maximale.
- Vingt-cinquième rue, chantonna distraitement le contrôleur.
La femme qui s'en allait pour toujours se leva, prit sa valise et parcouru le couloir, comme si elle terminait son voyage au lieu de le commencer.
Elle était debout tout contre la porte de sortie, lorsque le convoi s'arrêta. Elle descendit, suivit le quai et prit l'escalier qui menait à la rue. Elle acheta un journal au kiosque de la salle d'attente, s'assit sur un banc et consulta la page des petites annonces.
François Truffaut avait ses propres raisons de choisir une fin différente, pour ceux qui voudraient en savoir plus sur l'adaptation (mieux vaut quand même voir le film et lire le live avant) :
Roman policier lu dans la cadre du challenge Petit Bac 2013 chez Enna, catégorie couleur avec le mot NOIR dans le titre.
Je me souviens parfaitement du thème de ce film où Jeanne Moreau est sublime, comme d'hab. En revanche je n'avais lu le livre, à mettre dans ma PAL...
RépondreSupprimerAh là là, maintenant il faut que je voie ça!!! Un auteur vraiment bien adapté au cinéma. J'ai lu La sirène du Mississipi.
RépondreSupprimerje n'ai jamais lu le roman mais le film m'avait beaucoup plu. Comme le dit Jeanmi Jeanne moreau est juste sublime et juste. Cela donne envie de le revoir
RépondreSupprimerJe n'avais pas aimé le Truffaut mais le livre me tente !
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