mardi 4 février 2014

Belgrave Square - Anne Perry

Titre original : Belgrave Square (1992)
Traduit de l'anglais par Anne-Marie Carrière
Editions 10/18, collection Grands détectives, 2002 pour la traduction française, 413 pages

Quatrième de couverture :
Lorsque William Weems, un obscur usurier, est assassiné du côté de Clerkenwell, une discrète jubilation se répand parmi ses clients qu'il n'hésitait pas, à sa façon, à  "étrangler" sans pitié. Quand l'inspecteur Pitt trouve dans son bureau une liste comportant plusieurs noms du Gotha londonien, il prend conscience de l'ampleur de sa tâche. William Weems était en fait un véritable maître chanteur. Une fois encore, son épouse Charlotte, issue elle aussi de la meilleure société, va s'avérer la meilleure des alliés. Que ce soit au cours de bals chatoyants ou de "five o'clock tea", elle va observer ce monde de passion, de pouvoir et de cupidité que la police n'est pas autorisée à voir et permettre d'identifier le coupable. Décidément, ce que femme veut...


Eté 1889. Au lendemain de l 'assassinat de William Weems, un vulgaire usurier de Clerkenwell, la police locale est dessaisie de l'affaire qui se trouve confiée à l'inspecteur Pitt, à la surprise de celui-ci.
Thomas découvre bientôt que l'usurier, abattu à bout portant d'une décharge de chevrotines en pleine tête, se doublait d'un redoutable maître chanteur. Parmi ses victimes se trouvait Lord Sholto Byam, un ponte du ministère des finances. C'est lui qui, craignant d'être accusé du meurtre, a sollicité l'aide de Micah Drummond, le supérieur de Thomas, au nom d'une mystérieuse "camaraderie".

Comment Lord Byam, notable résidant à Belgrave Square, a-t-il eu si rapidement connaissance du meurtre de William Weems à Clerkenwell, alors que les journaux n'ont même pas mentionné l'affaire ? C'est là l'un des nombreux points que Thomas va devoir éclaircir.
Dès le début de l'enquête, le chantage dont était victime Lord Byam met en lumière une tragédie survenue vingt ans plus tôt : lors d'un séjour de Lord Byam chez Lord et Lady Anstiss, dans leur maison de campagne, Lady Anstiss s'éprit follement de l'ami intime de son mari - qui avait flirté avec elle un peu inconsidérément - et se suicida.
Mais Lord Byam n'était pas le seul que l'usurier faisait chanter, d'autres notables londoniens étaient aussi les victimes de Weems, comme en témoigne une liste retrouvée dans le bureau de ce dernier. Quels secrets  redoutaient-ils de voir révélés au grand jour ? Auraient-ils été jusqu'à tuer pour se débarrasser de Weems et de la menace qu'il représentait ? Mais dans ce cas pourquoi le meurtrier n'a-t-il pas emporté la liste l'incriminant ?
Ou bien Weems a-t-il été abattu par une victime figurant sur l'autre liste trouvée sur place, celles de malheureux du quartier lui ayant emprunté une somme d'argent et se trouvant ainsi pris dans un cycle infernal et saignés à blanc ?

De nombreux points demeurent obscurs. L'arme, qui n'a pas été précisément identifiée car elle n'a pas été retrouvée sur place, était probablement un fusil de chasse au canon très large. Une arme peu répandue dans les bas quartiers. Et comment l'assassin  a-t-il pu l'apporter et l'emporter après le meurtre sans se faire remarquer ? Autre point : Weems semble avoir été pris par surprise, il n'a pas tenté de se défendre, ainsi que le prouvent la position du corps et l'ordre qui règne dans son bureau. Comment est-ce possible ?
Et quelle est donc cette société occulte dont certaines victimes semblent avoir été membres ?

Personne, évidemment, ne pleure la mort de Weems et la police n'a guère envie de trouver son meurtrier - surtout s'il s'agit d'un malheureux acculé à la misère - pour l'envoyer à l'échafaud.
Pitt hocha la tête :
- Personnellement, je me moque de savoir qui est l'assassin. Mais il est de mon devoir de l'arrêter. On ne peut autoriser les gens à se faire justice eux-mêmes, sinon où irait la société ? (page 389)

Anne Perry nous montre dans ce roman les difficultés rencontrées par la police suite à l'échec de l'arrestation de Jack L'Eventreur. L'été suivant, le ressentiment contre les forces de l'ordre est encore vif.
Avec Belgrave Square, Anne Perry lève le voile sur les dessous de la politique et nous emmène sur les traces d'une société secrète, Le Cercle intérieur. Une soi-disant société philanthropique qui œuvre dans  l'ombre - clandestinement accuseront les uns, avec discrétion se défendront les autres - et envers laquelle ses membres doivent prêter serment d'allégeance. Mais  jusqu'où cela peut-il les entraîner et quelles sont au juste les actions de cette société ?
Dans ce réseau politique, le beau-frère de Thomas, Jack Radley, doit se trouver des soutiens judicieux pour appuyer sa candidature à la députation.

Tout comme dans l'enquête précédente, L'incendiaire de Highgate, je n'ai pas trouvé que l'on soit au cœur d'une enquête trépidante avec  retournements de situation multiples et spectaculaires et empilement de cadavres, mais c'est une bonne enquête qui tient ses promesses et qui nous emporte dans une autre époque. J'ai trouvé le contexte intéressant, la tension monte régulièrement jusqu'au dénouement final que j'ai trouvé  inattendu et très réussi.
On peut reprocher les perpétuelles scènes de séduction un peu niaises avec force embarras masculin - quelle audace d'imaginer qu'une telle femme puisse le remarquer, il s'auto-fustigeait  violemment à cette pensée - et rougissements,  battements de cils et soupirs du côté féminin, scènes d'autant plus agaçantes quand elles concernent des personnes parfaitement adultes (j'ai relevé cela aussi dans la série William Monk) mais on dira que ça fait partie du charme victorien ;-)
Un douzième tome de bonne facture dont j'ai eu le plaisir de partager la lecture avec Bianca, Fanny, Claire,  Céline et Sybille.



Rendez-vous le 3 mars avec le tome 13 : Le Crucifié de Farrier's Lane


Lu dans le cadre des challenges British Mysteries chez Lou ( ma 1ère lecture pour cette deuxième édition), I love London chez Maggie et Titine, Challenge Victorien chez Arieste, La plume au féminin chez Opaline Challenge XIXème siècle chez Fanny et ma première participation au Petit Bac 2014 chez Enna (catégorie lieu)

15 commentaires:

  1. Ce qui est frappant dans ces livres , c'est la position de la police: les inspecteurs doivent passer par l'entrée des domestiques , on les regarde avec mépris et condescendance, on les deteste..Pas facile de faire son devoir dans ces conditions!
    Des livres au charme un peu désuet , certes , mais on replonge toujours dedans avec delectation. On est sur de ce que l'on va trouver , sûr que l'on va se régaler; C'est là tout le charme D'Anne Perry.
    Suis en ce moment dans la trilogie écossaise de Peter May, je dévore et me régale, je tiens jusqu'à une heure du matin pour ne pas en perdre une miette! Tu aimerais sûrement!
    Bises et à bientôt!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La police était rarement la bienvenue. La haute société considérait sa présence comme une atteinte à son "standing" et la population des quartiers pauvres la détestait tout autant, sans doute parce qu'elle se sentait vulnérable face à elle.
      "- Curetons et flics, tous pareils, toujours à rendre coupables les pauvres gens ! C'est un peu trop facile, non ? Parce que moi je ne connais personne qui n'aie rien à se reprocher !
      (Maigret) - C'est bien toute ma difficulté... " C'est un extrait de Monsieur Lundi de Georges Simenon, un épisode que j'aime beaucoup, avec un vagabond qui cite Voltaire et Pascal :-)
      Je viens juste de commencer la trilogie de Peter May avec L'île des chasseurs d'oiseaux :-) !
      Bises Malyss, à bientôt.

      Supprimer
  2. Je viens de m'abonner à ton blog, comme ça je ne manquerai plus tes articles ! Contente d'avoir partagé ce nouvel opus avec toi, je l'ai trouvé plus intéressant et meilleur que le précédent mais de toute façon avec Anne Perry, on n'est jamais dans la tension ou le suspens trépident mais dans quelque chose de plus feutré et classique, vivement le tome 13 !!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai qu'on n'est jamais dans le trépidant avec Anne Perry :-), c'est sans doute un ingrédient qu'on trouve davantage dans les romans policiers actuels représentatifs de notre époque stressée. Je ne suis d'ailleurs pas systématiquement demandeuse (j'aime beaucoup Simenon par exemple ;-) ni hostile... tout dépend du contexte et de l'histoire en fait. J'ai trouvé celle là bien menée et je retrouve toujours ce contexte victorien avec plaisir. :-)

      Supprimer
  3. Ces enquêtes sont un peu inégales, mais plaisantes à lire (j'ai un peu abandonné ces deux séries, d'ailleurs)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'étais à fond dedans quand j'ai découvert les enquêtes de Charlotte et Thomas Pitt puis j'ai fait une petite pause d'environ deux ans. J'en avais quelques tomes d'avance sur mes étagères. De la série William Monk, je n'ai lu que le 1er tome.

      Supprimer
  4. Comme toi j'ai vraiment aimé le contexte où la police londonienne en pleine déroute et doit redorer son blason. J'ai toujours l'impression d'apprendre des choses avec les romans de Anne Perry.
    Vivement le mois prochain! :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, on découvre toujours quelque chose sur l'époque victorienne. Je me demande ce qui nous attend avec le prochain, le titre fait froid dans le dos :-)

      Supprimer
  5. j'en déduis que ce roman fait partie de la série des Pitt. j'aime beaucoup les romans d'Anne Perry et ai hâte de poursuivre la lecture de cette saga. Ce tome me fait très envie car j'aime lire des récits en lien avec l'histoire de jack l'éventreur. merci pour la découverte

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, c'est un roman de la série Charlotte et Thomas Pitt, je préciserai en tête sur les prochains billets. En fait, sur l'histoire de Jack l'Eventreur elle-même, elle ne dit pas grand chose (je préfère préciser au cas où tu aurais des attentes à ce sujet), mais on voit que la police à perdu sa crédibilité et que la presse a tôt fait de jeter de l'huile sur le feu.
      A propos de Jack l'Eventreur, j'ai repéré une BD, From Hell, mais je ne l'ai pas lue.

      Supprimer
    2. Correction : la police a perdu...

      Supprimer
  6. J'ai également passé un très bon moment en compagnie de Charlotte et Thomas. Une fois de plus, l'auteure a su me plonger au coeur de cette Angleterre victorienne. Comme le dit Fanny, on a toujours l'impression d'apprendre quelque chose en lisant ses romans.
    Vivement le prochain tome dont le titre est prometteur !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est une époque que j'aime beaucoup et je la retrouve chaque fois avec plaisir.

      Supprimer
  7. J'ai préféré celui-ci aux deux tomes précédents ! C'est toujours un plaisir de retrouver notre couple d'enquêteurs !

    RépondreSupprimer
  8. A petite dose, les romans de Anne Perry sont très plaisants à lire et puis on retrouve le Londres victorien que nous apprécions tant !

    RépondreSupprimer

Vous aimerez peut-être

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...